Il y a deux façons d’éclairer le monde. La première est d’en dissiper l’obscurité, de chercher la vérité sous les faux semblants, d’en abolir les apparences au profit de la transparence. Mais de même que la lumière du jour dissimule les étoiles, la lumière de la raison recouvre les ombres du masque mensonger de la vérité. La seconde revient au contraire à consentir à l’opacité des phénomènes comme à l’altérité de l’Autre, à penser l’impensable, la différence, l’irréductible singularité de tout ce qui existe et dont on ne peut jamais vraiment rien dire. On y perd la vérité mais on y gagne en retour la franchise, la candeur et le sens de l’étonnement.
Raphaël Enthoven – F.Culture, 12/06/2008.